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Maréchal Ferdinand Foch [fr]

PARIS, VENDREDI nov. 9e, 1928

« Les Morts héroïques d’Irlande ont parfaitement droit à l’hommage des vivants car ils ont prouvé dans certains des combats les plus violents de la guerre mondiale que l’esprit invincible de la race irlandaise — l’esprit qui les a placés parmi les plus grands soldats du monde — vit toujours et est plus fort que jamais.

J’ai eu l’occasion de mettre à l’épreuve la vaillance des Irlandais servant en France, et, qu’ils soient Irlandais du Nord ou du Sud, ou d’un parti ou d’un autre, ils ne m’ont pas manqué.

Certains des combats les plus durs des jours terribles qui ont suivi la dernière offensive des Allemands sont tombés aux mains des Irlandais, et certains de leurs splendides régiments ont dû endurer des épreuves qui auraient pu à juste titre imposer à point de rupture la capacité des meilleures troupes du monde.

SUR LA SOMME

Jamais les Irlandais ne m’ont fait défaut en ces jours terribles. Sur la Somme, en 1916, j’ai vu l’héroïsme des Irlandais du Nord et du Sud, je suis arrivé sur les lieux peu de temps après la mort de ce très galant gentilhomme irlandais, le major William Redmond. J’ai vu des Irlandais du Nord et du Sud oublier leurs différences d’âge et se battre côte à côte, donnant librement leur vie pour la cause commune.

Dans la guerre, il y a des moments où la nécessité de céder sa vie est le devoir le plus urgent du moment, et il y a eu de nombreux moments de ce genre dans notre longue lutte. Ces héros irlandais ont donné leur vie librement, et, en honorant alors, j’espère que nous ne laisserons pas notre chagrin nous faire oublier notre fierté de l’héroïsme glorieux de ces hommes.
Ils ont laissé à ceux qui viennent après un héritage glorieux et une inspiration au devoir qui vivra longtemps après que leurs noms auront été oubliés. La France n’oubliera jamais sa dette envers les morts héroïques irlandais, et dans le cœur du peuple français vit aujourd’hui sa mémoire comme celle de la mémoire des héros d’autrefois, préservée dans les contes que les vieux racontent à leurs enfants et aux enfants de leurs enfants.

UN HOMMAGE ALLEMAND

Je ne connais pas de meilleur hommage à la vaillance irlandaise que celui rendu après l’armistice par un Haut Commandement allemand, que j’avais connu à des jours plus heureux. Je lui demandai s’il pouvait me dire quand il avait noté pour la première fois la moralité déclinante de ses propres troupes, et il répondit que c’était après que les troupes choisies sous son commandement eurent eu l’expérience répétée de rencontrer les troupes irlandaises intrépides qui s’étaient opposées à elles lors de la dernière grande poussée qui devait séparer les armées britannique et française et donner à l’ennemi la victoire tant recherchée.

Les Irlandais avaient subi des attaques si constantes qu’on pensait qu’ils devaient être complètement démoralisés, mais ils semblaient toujours trouver une nouvelle énergie pour attaquer leurs assaillants, et à la fin, la fleur de l’armée allemande s’est flétrie et s’est évanouie en tant que force efficace.

« ILS N’ONT JAMAIS ÉCHOUÉ »

Quand est venu le moment de prendre l’offensive tout le long de notre ligne, ce sont ces mêmes troupes irlandaises usées que nous avons placées dans le fourgon, faisant appel après appel à leur dévouement, mais ne les trouvant jamais nous échouent. Dans les jours critiques de l’offensive allemande, où il était nécessaire que des vies soient sacrifiées par milliers pour ralentir la ruée de l’ennemi, afin que nos forces harcelées aient le temps de se réformer, c’est sur les Irlandais que nous nous sommes appuyés à plusieurs reprises pour tenir ces positions désespérées, et nous les avons trouvés toujours en réaction.

Encore et encore, quand les plus courageux étaient nécessaires pour retarder l’avance de l’ennemi, ce sont les Irlandais qui étaient prêts et à tout moment les soldats irlandais se sont battus avec le courage et la détermination rares qui ont toujours caractérisé la course sur le champ de bataille.

« NOUS N’OUBLIERONS JAMAIS »

Une partie de la fleur de la chevalerie irlandaise repose dans les cimetières qui ont été réservés en France, et le peuple français aura toujours ces rappels de la dette que la France doit à la vaillance irlandaise. Nous verrons toujours que les tombes de ces héros de l’autre côté de la mer sont entretenues avec amour, et nous essaierons de faire en sorte que les générations qui nous suivront n’oublient jamais les morts héroïques de l’Irlande.”